CHETAIBI Article du 30-12-2011
Annaba : Chétaïbi, la baie au bois dormant
Chétaïbi, un petit bourg de rêve dont tout le monde loue sa beauté et qui a changé plusieurs fois d’appellation tout en restant une cité tout a fait vierge avec comme véritable rempart sa forêt très dense.
Chétaïbi, un petit bourg de rêve dont tout le monde loue sa beauté et qui a changé plusieurs fois d’appellation tout en restant une cité tout a fait vierge avec comme véritable rempart sa forêt très dense. Les annales retiennent que de Tacatua, la romaine à Chétaïbi, en passant par Tekkouche et Herbillon, le minuscule quartier colonial érigé à la fin des années 1850, la commune l’une des plus vieilles d’Algérie, semble immuable autant dans son charme et sa beauté séduisante que dans son évolution.
Chétaïbi abritant près de 8.000 âmes, n’est pas cette cité balnéaire
que les gens rompus au tourisme international peuvent imaginer. Son
attraction sur les investisseurs potentiels demeure nulle en dépit de
tous les atouts multiples qu’elle recèle. Pourtant elle n’est qu’à une
heure du chef lieu de wilaya.
Mardi 21 décembre. Ce jour là, l’hiver marque son entame. La journée
la plus courte de l’année est plutôt moins pluvieuse que les
précédentes. Ce ne sera certainement que partie remise. Un répit de
courte durée pour cette région habituellement bien arrosée. La pancarte
annonce Chétaïbi que l’on atteint après quelques kilomètres en prenant
une descente raide. Le village qui a eu droit à tous les éloges des
passants en quête d’une image d’Epinal paraît assombri sous les épais
nuages. C’est comme si Chétaïbi avait troqué son look d’été et sa
singulière luminosité, mais sans se départir, pour autant, de
l’envoûtement qu’il exerce sur le visiteur. Ses magnifiques atours lui
offrent des monts boisés à pertes de vue, confirment le charme
exceptionnel, connu et reconnu, d’une baie dont on dit l’une des
meilleures au monde.
A l’entrée du village, l’eau pluviale gênée dans son cours normal,
prend la destination du centre. L’on a l’impression que l’eau jaillit
d’une nouvelle source naturelle comme il en existe beaucoup dans la
région.
Les agents groupés autour de l’engin sont à l’œuvre et tentent de
dégager tous les corps solides pour lui permettre de reprendre son
parcours la conduisant tout droit à la mer.
Les dernières pluies ont drainé tout ce qui était sur leur passage
obstruant ainsi l’ouvrage devant les contenir et les canaliser pour se
jeter en mer. Le magnifique front de mer est englouti par la boue. La
rue est déserte. Pas âme qui vive. Les commerces, qui en période
estivale grouillaient de monde, ont tous, baissé rideau.
Depuis longtemps déjà. Seul un café est en activité. C’est l’hiver à
Chétaïbi. Même le port semble se soumettre aux caprices de la nature et
se résigner à l’inertie. A proximité, le stade communal, dans un bien
piètre état, arrive à réunir un groupuscule de jeunes autour d’un match
de quartier ou peut-être d’une séance d’entraînement. Le cœur du village
bat un peu plus haut. Alentours de l’hôpital. Là, il y a des quelques
signes de vie ou plutôt des gens vaquant à leur occupation.
Une prouesse, des retards rattrapés
A l’antique Tacatua, l’été dernier, il ne fait pas bon vivre. Le
village entre en hibernation. L’isolement et la pauvreté conjuguent
leurs effets qui pèsent lourdement sur les quotidiens qui se suivent et
se ressemblent. La commune compte parmi celles que l’on désigne par le
qualificatif «déficitaire», c’est à dire ne disposant pas de ressources
propres. La dette cumulée estimée à 2 milliards 800 est effacée en
2007.
Chétaïbi vit des subventions de l’Etat. Les enveloppes qui lui sont
allouées sont orientées vers les opérations d’AEP, d’assainissement et
de réfections des routes.
A ce stade de son développement, c’est le port de pêche qui occupe le
plus de monde, pour ne pas dire que l’essentiel des ressources provient
de la pêche.
Dans cette région où la forêt a jeté son dévolu sur la quasi-totalité
de l’espace où tout est montagneux, c’est l’agriculture de montagne qui
est pratiquée, mais les parcelles familiales ont des rendements très
limités et la production est plutôt destinée à la subsistance, étant
très réduite. Pour pouvoir joindre les deux bouts, tout le monde
s’adonne également à l’élevage de l’ovin, du bovin et de la volaille.
Pour ne pas attenter à l’environnement, le site étant classé
touristique, l’exploitation des différents gisements est prohibée.
Autrefois les carrières faisaient vivre plusieurs familles.
Ces quatre dernières années, la dynamique nationale n’a pas occulté
Chétaïbi, qui, il fut un temps, était en ballotage entre Skikda et
Annaba.
La commune a même réalisé la prouesse de combler le retard accumulé et
Dieu seul sait combien il est grand. L’édile manifeste une certaine
satisfaction du devoir accompli quand il commente l’état de sa commune. «
Nous consommons à bon escient les enveloppes que nous recevons chaque
année pour la conduite de projets de développement. Le chef lieu de
commune et les autres agglomérations changent toutes de visage suite aux
avancées certaines qu’enregistrent les aménagements urbains. Les
routes y sont bitumées et l’éclairage « rétabli ».
Le P /APC, sollicité de temps à autre par ses subalternes qui se
présentent à son bureau pour lui « arracher » une signature qu’il appose
soigneusement sur les différents documents qui lui sont soumis, ne perd
pas le fil des idées quant il évoque les actions de développement menée
dans sa commune.
Le poumon de Chetaïbi demeure incontestablement le port de pêche. Sa
construction remonte à la période coloniale, mais l’infrastructure a
connu des aménagements importants avec l’objectif de relancer l’activité
pêche. C’était en 1990. L’ensemble du port a été aménagé et la grande
jetée est aujourd’hui en cours de renforcement. La flottille forte de
quelque 200 embarcations s’adonne à la pêche saisonnière, actuellement
c’est la sardine et la bonite que l’on remonte dans les filets. La
production est écoulée sur Annaba et Skikda avec lesquelles les
professionnels de la mer sont liés avec des conventions.
Chétaïbi mise beaucoup, d’ailleurs, sur l’acquisition d’un autre port
de pêche, mais cela reste tributaire des études techniques concernant
quatre sites dans la wilaya de Annaba, choisis pour l’érection des deux
ports, l’un de pêche et l’autre de plaisance. En attendant que ce vœu
soit exaucé, Chétaïbi a pris ses devants en réunissant les bases de la
relance. Le village a cassé l’isolement en se reliant à Annaba via
Berrahal. De même qu’il dispose d’un réseau routier fort au total de 80
km.
Le tronçon reliant Behloul à El Azla est toutefois considérablement
dégradé. Les habitants de certaines agglomérations sont parfois
contraints de faire de longs détours pour rejoindre le chef lieu de
commune à Chétaïbi. Ici le chômage sévit beaucoup plus que dans d’autres
régions. Les débouchés sont entièrement absents. La quasi-majorité
émarge dans le social et les dispositifs de jeunes. Les plus chanceux
parmi les artisans et autres détenteurs de métiers ont bénéficié de
locaux réalisés dans le cadre du programme du président de 100 locaux
pour chaque commune. Au total 75 locaux ont été livrés et sont
fonctionnels.
Les jeunes bénéficiaires s’y occupent avec les moyens du bord, qui,
dans les services, qui dans d’autres métiers. Les trois Maisons de
jeunes et le centre culturel qui sera bientôt opérationnel permettront
de soustraire un pan entier de la jeunesse de son oisiveté. Ces mêmes
jeunes disposeront également d’une nouvelle salle de sport inscrite en
sectoriel et qui est en voie de livraison.
Le gaz de ville arrive…
A Chétaïbi, les besoins en logements s’expriment, mais, sans pour
autant que la crise n’atteigne celle dont pâtissent les grandes cités.
La commune et ses agglomérations ont eu droit à un programme de 400
logements tous types confondus. Dans le segment rural, 110 unités sur
les 196 ont été remises aux attributaires. 80 autres sont livrés
prochainement. Dans la catégorie LSP 29 sur un quota de 44 ont été
distribués. La population est d’autant plus gagnée par la paupérisation
que les lots à bâtir n’ont pas trouvé preneurs alors que dans les autres
villes du pays, c’est la ruée sur les lotissements et les constructions
individuelles. Le relief très accidenté et l’érosion des sols rendent
toute construction très onéreuse. Au titre du quinquennal, la commune a
bénéficié de 130 logements sociaux et 100 autres LPA. Le foncier
urbanisable s’étant rétréci, les émigrés qui veulent investir dans la
construction convoitent aujourd’hui les localités avoisinantes et
notamment La Marsa, dans la wilaya de Skikda, même en mettant le prix.
A Chétaïbi, l’eau coule de source mais ne répond pas au besoin
notamment en période estivale où la population augmente
substantiellement avec l’arrivée en force des estivants. Pratiquement
chaque agglomération est alimentée d’une source naturelle et là où le
besoin se fait sentir, c’est la citerne communale qui supplée aux
fontaines. Cela en attendant que le réseau très défectueux soit
totalement rénové pou pouvoir acheminer l’eau à partir de Guerbaz dans
la wilaya de Skikda. Le barrage dont l’étude est terminée viendra à
point pour régler définitivement le problème de l’eau.
L’année 2012 s’annonce pour ainsi dire de bon augure pour Chétaïbi
qui sera bientôt alimentée en gaz naturel. La pose des canalisations de
transport du gaz est annoncée pour juin-juillet.
Il faut savoir que l’hiver est très rude et les habitants s’alimentent
en gaz butane. Tout le monde s’accorde à dire que Naftal fait d’énormes
efforts pour qu’il n’y ait pas de rupture. La couverture est jugée
bonne, toutefois, l’unique point de vente est situé au chef-lieu. Les
habitants des autres localités doivent faire parfois de longs
déplacements pour acquérir l’indispensable bonbonne de gaz.
Il aura donc fallu pour l’une des plus vielles communes, l’année qui
pointe à l’horizon pour espérer se chauffer par le gaz naturel et jouir
des commodités que cela procure. Point besoin de dire que l’industrie
est totalement absente. Seul le gisement d’argile d’Ain Abdallah est
actuellement exploité par la RCE pour extraire un produit et l’utiliser
dans la production du ciment.
Une localité viable
En quelques années, la localité est en passe d’inverser la tendance. De
commune complètement isolée, Chétaïbi, qui est jalouse de sa promotion
en localité viable s’ingénie à soigner son image. Toutes les opérations
d’aménagement urbain viennent à leur terme. Le taux de couverture en
électricité est aussi considérable quand on sait qu’il avoisine les 80
%. En dépit du fait que la population scolaire est dispatchée sur des
zones d’habitation éparses, la commune arrive tant bien que mal à
prendre totalement en charge le transport scolaire en exploitant une
dizaine de bus. Il en est aussi ainsi pour le transport des voyageurs
qui couvre la totalité du territoire de la commune. Le parc roulant fort
de 12 bus et une vingtaine de taxis est estimé satisfaisant d’autant
plus que les déplacements vers et à partir de Annaba sont moins
fréquents durant la journée. L’essentiel des navettes se font la matinée
et en fin d’après midi.
A Chétaïbi, qui, l’on conçoit l’avenir de la région dans le
développement de ses potentialités et qui ne sont pas moindres. La
réhabilitation et la modernisation de l’activité pêche, la promotion du
tourisme et la création d’une zone d’activité pour les créneaux non
générateurs de pollution sont autant de priorités hiérarchisées par les
responsables locaux. Chetaibi renferme en son sein pas moins de 7
magnifiques plages aménagées, sécurisées, alimentées en eau si l’on
excepte le Sable d’or qui en est encore dépourvue en raison de la
vétusté du réseau et qui connaissent une affluence record durant l’été.
Les potentialités ne font pas défaut, d’aucuns en conviennent l’accueil
des visiteurs pour ne pas dire des touristes, semble reléguer au
dernier plan des préoccupations du capital privé qui semble bouder
l’activité pourtant porteuse en rapport avec la villégiature notamment.
L’infrastructure hôtelière et de restauration fait cruellement défaut.
Ses habitants n’ont pas tort de dire que la beauté du village ne leur
fait pas vivre. D’autant que tout la situe dans la liste des cités
prospère.
La région dispose d’une zone d’extension touristique, mais présentement
l’activité touristique digne de ce non est totalement absente faute
d’infrastructure qui est la source du grand tourisme, celui qui peut
générer des ressources à la commune. Dans ce registre tous les regards
sont braqués sur d’éventuels investissements étrangers. La perspective
est d’autant plus envisageable que les potentialités incommensurables
sont à même de faire basculer toute la région dans la prospérité
pérenne. Quand bien même les subterfuges brandis par le passé par les
opérateurs pour faire valoir les aspects sécuritaires et l’isolement ne
tiennent plus la route, l’investissement demeure le grand absent. La
construction d’une briqueterie, par exemple, permettra à la commune de
réduire d’une manière signifative le chômage qui sévit fortement. C’est
même, l’une des revendication des habitants et des élus.
Saïd Lamari